Le Sénat propose des contrôles à tous les niveaux dans les EHPADs

La sortie du livre « les Fossoyeurs » de Victor Castanet, a suscité une cascade d’émotions et a déclenché une commission d’enquête par la commission des Affaires Sociales du Sénat. Le mercredi 13 juillet 2022, Catherine Deroche (sénatrice LR de Maine et Loire) Présidente, Bernard Bonne (sénateur LR de la Loire) Rapporteur, et Michelle Meunier (sénatrice SER de la Loire Atlantique) Rapporteure, ont communiqué leurs conclusions devant la Presse.

Les sénateurs ont débuté leur intervention en précisant qu’il n’était pas question de faire de « l’EHPAD Bashing », ni de faire un réquisitoire sur Orpea étant donné que de nombreux autres acteurs sont concernés. Il y a actuellement 7.500 EHPADs en France que se partagent de nombreux Groupes, privés, commerciaux et publics. Bernard Bonne a remercié Victor Castagnet et l’infirmier qui sont à l’origine des déclarations. Il a salué le dévouement du personnel dans les EHPADs (privés, commerciaux, et publics), et déclaré que la commission a constaté que les autorités de contrôle exercées ne suffisent pas. Il est nécessaire de renforcer les contrôles à tous les niveaux. Actuellement, les compétences de contrôles des autorités de tarification et de contrôle, s’arrentent au niveau de l’établissement.  La commission propose d’y remédier en donnant une vision complète des flux financiers entre le siège et les établissements. Il est nécessaire d’étendre les contrôles et de les renforcer, à tous les groupes, qu’ils soient privés, commerciaux ou publics.

Le contrôle des groupes et les moyens : 

S’agissant du contrôle des groupes, la commission préconise de les faire contrôler par les inspections générales (Igas/igf) (proposition n°1) et de mettre en place un dialogue de gestion entre la CNSA (Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie) et chaque groupe (proposition n°2). Elle préconise également plusieurs mesures visant à améliorer le contrôle (propositions 7, 11, 12) ou le pilotage de l’offre d’hébergement (propositions 13 14 15). S’agissant de la gouvernance du secteur, elle propose également la création d’une conférence territoriale des personnes âgées (proposition 21) qui ferait figure d’interlocuteur unique pour les établissements dans un département et qui prendrait la forme d’une conférence départementale dont l’ARS et le conseil départemental seraient membres, selon le schéma dessiné par le rapport de Dominique Libault de mars 2022.

Mieux lutter contre la maltraitance : 

Les travaux ont mis en évidence la recherche du profit par les Groupes au détriment des résidents. Au cours de l’une des enquêtes, Catherine Deroche, Présidente de la Commission, a déclaré avoir été choquée de constater dans un établissement que celui-ci baissait le grammage de la viande pour faire des économies sur le bien-être des personnes âgées en EHPAD. Les contrôles dans les établissements seront donc plus fréquents à l’avenir. Selon Jean-Luc Gleyze, président du Conseil départemental de Gironde, « les outils de détection des maltraitances sont trop éclatés, avec trois canaux : l’ARS, le département et le 3977. Ainsi les saisines sont assez rares même si elles sont aujourd’hui en augmentation. Nous observons une grande difficulté à recouper les informations pour analyser les signaux faibles ». L’une des mesures envisagées est de redoubler d’efforts pour faciliter la détection des situations problématiques graves en établissement.  A cet effet, la commission des affaires sociales du Sénat prévoit de fiabiliser et de finaliser au plus vite les outils informatiques nécessaires mais aussi de développer la culture du signalement en EPHAD. Les CVS (Conseils de la Vie Sociale) l’instance qui vise à associer les usagers aux fonctionnements des établissements sociaux et médico-sociaux, pourraient contribuer à mieux diffuser la culture de prévention de la maltraitance adressée par les familles aux autorités tarificatrices et de contrôles. 

Suivre les signalements de maltraitance : 

S’agissant du dialogue avec les familles, il est proposé de mieux suivre les signalements de maltraitance par la mise en place d’un système d’information. Celui-ci permettra de les centraliser et de les faire remonter plus efficacement, ainsi que d’imposer une obligation de réponse aux familles qui ont fait des signalements, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui. (Propositions 22 et 23)

Actuellement, les associations d’usagers estiment qu’un CVS sur cinquante seulement est opérationnel, et qu’une très grande proportion des résidents, des familles et des personnels, ne connaît pas son existence et son rôle. La mission propose de renforcer la participation d’associations représentant les résidents aux travaux des CVS, afin de ne pas faire peser le poids de la participation aux CVS sur les seules familles. La commission a constaté qu’aujourd’hui les difficultés de fonctionnent des CVS sont notamment liées au manque de disponibilité des familles qui ne peuvent pas participer à ces travaux (propositions 18 et 19). Elle relève aussi la méconnaissance de ces structures et en appelle à la diffusion large par la CNSA d’un guide pratique à l’attention des familles et des directions d’établissement. 

Cette réforme est particulièrement nécessaire pour l’avenir de notre société. Le besoin de place en EHPAD va continuer de s’accroitre dans les années qui viennent. La population des personnes âgées dépendantes, estimée à 2,5 millions de personnes en 2015, pourrait atteindre 4 millions en 2050. Si la dépendance évolue de façon plus optimiste, il faudrait ouvrir 56000 places en EHPAD d’ici 2030. Pour aller plus loin, la commission des Affaires Sociales du Sénat appelle à une discussion sur un projet de loi consacré au grand âge.

Liste des propositions : https://www.senat.fr/rap/r21-771/r21-7710.html#toc0